23. Le Concile de Jérusalem

18/10/2020 00:38

23. Le Concile de Jérusalem

Conile de Jérusalem - SanhédrinIl est difficile de situer l’assemblée de Jérusalem car le récit des Actes des Apôtres (15, 1-34) ne coïncide pas avec ce que dit Paul dans sa lettre aux Galates (2, 1-10). Aujourd'hui, les experts sont d’avis que c’est Paul qui situe correctement cet événement.

Après son séjour en Arabie et à Damas (Galates 1, 18), Paul parle d'une première rencontre avec Pierre et Jacques, puis d'une deuxième rencontre (celle du Concile) qu'il situe «au bout de quatorze ans» (Galates 2, 1). Cela veut donc dire que Paul a déjà fait deux voyages missionnaires, et non pas un seul. L’assemblée aurait donc eu lieu en l’an 51.

De son côté, Luc aurait «avancé» la date afin qu’elle soit plus près du début de l'activité missionnaire de Paul et ainsi légitimer le plus tôt possible la mission de l'Apôtre auprès des non-Juifs.

...réticences d'un groupe
de chrétiens qui, au nom
de la fidélité à la Loi et de l'élection privilégiée d'Israël, tenaient à ce que ceux qui deviennent chrétiens se
fassent circoncire

Paul, au cours de ses voyages, a fondé plusieurs communautés en milieu grec. Le problème de l'accueil des non-Juifs se pose alors : doivent-ils se faire circoncire pour marquer leur appartenance à la communauté chrétienne? Doivent-ils observer les interdits alimentaires et toutes les lois de Moïse? Il est donc très vraisemblable que la rencontre ait eu lieu après le deuxième voyage, c'est-à-dire quand le nombre de convertis non-Juifs est devenu plus important.

En gardant en mémoire ces quelques considérations, l’une ou l’autre date ne causent pas de grands problèmes. Nous verrons donc cet événement ici, après le premier voyage, afin de suivre ensuite plus facilement les déplacements de Paul d’abord avec Barnabé et ensuite avec Silas, selon la chronologie de Luc dans les Actes des Apôtres.

Luc indique que pour cette rencontre importante, les représentants d’Antioche de Syrie - Paul, Barnabé et Tite -, s'acheminent vers la Ville sainte par voie terrestre : «Passant par la Phénicie et la Samarie, ils y racontaient la conversion des nations païennes et procuraient ainsi une grande joie à tous les frères.» (Actes 15, 3) À Jérusalem, l'élite de l'Église-mère les attend.

Les conséquences de cette réunion dans l'histoire du christianisme sont telles que certains la désigneront plus tard de «concile de Jérusalem», ce qui laisserait supposer une assemblée bien structurée, rassemblant de nombreuses personnes. Il faut penser plutôt à une réunion de quelques représentants de l'Église d'Antioche avec Jacques, Pierre et Jean, de l’Église de Jérusalem. Même s’il s’agit d’une réunion privée, aucun autre concile n’a pris des décisions aussi importantes que celle de Jérusalem. Sans ce «premier concile», les autres n'auraient pas été possibles.

À Jérusalem, on écoute d’abord avec enthousiasme le récit de la pénétration du christianisme dans les milieux païens. Rapidement cependant, la joie initiale est troublée par les réticences d'un groupe de chrétiens qui, au nom de la fidélité à la Loi et de l'élection privilégiée d'Israël, tenaient à ce que ceux qui deviennent chrétiens se fassent circoncire. Ils répétaient sans relâche qu'il fallait obliger tout le monde à observer la Loi de Moïse. Toujours brutal quand il polémique, Paul parlera de «faux-frères intrus».

Pour ces croyants de Jérusalem, il n'est pas question de vivre en communauté avec des non-juifs, ni de partager des repas avec ceux qui ne sont pas circoncis et qui ne respectent pas l'intégralité des prescriptions alimentaires de la Loi. Cette attitude restrictive ne cadre pas avec l’expérience des Juifs de la Diaspora qui avaient beaucoup plus d'ouverture envers les non-Juifs car ils vivaient avec eux.

À Jérusalem, Paul a amené Tite, un jeune homme que nous n'avons pas encore rencontré. C'est un Antiochien récemment devenu chrétien. Il fondait de grands espoirs sur celui qui deviendra l’un de ses plus grands collaborateurs. Il le nomme «son vrai fils dans la même foi» (Tite 1, 4). Pour Paul, ce jeune homme est une preuve vivante des nobles fruits qui poussaient déjà sur l'arbre de l'Église des Gentils. À Jérusalem, on ne pourrait résister au charme de ce chrétien sorti du monde non-juif. «Je suis monté à Jérusalem, écrira Paul. J'emmenai aussi Tite.» Il nous dit qu'il était né d'une famille païenne et non circoncis. Ce détail est fourni par Luc qui ajoute que «l'Église d'Antioche a fournit les fonds nécessaires au voyage de ses trois représentants.» (Actes 15, 3)

À Jérusalem, tous étaient conscients que l'attitude qu'on allait adopter à l'égard de Tite serait d'une importance capitale pour l'avenir de l'Évangile. Tite représentait symboliquement l'ensemble des Églises pagano-chrétiennes. S’il était accepté sans conditions, comme frère à part entière, ce serait une décision applicable à tous les chrétiens non-Juifs des nouvelles communautés.

Paul aurait vu son oeuvre compromise dans sa nature même, si la conception des judéo-chrétiens, insistant sur la circoncision pour tous devait triompher. Maintenir cette obligation pour les non-Juifs ferait de l'Église une secte de la Synagogue et annulerait l'universalité du salut. Les chrétiens non circoncis constitueraient au sein même de l'Église un groupe de deuxième classe. L'ancien mur de séparation dans le Temple, entre Juifs et non-Juifs, se dresserait à nouveau au sein même de l'Église chrétienne. Recevoir les non-Juifs dans l'Église, mais éviter de faire table commune avec eux, ferait d'eux des parias chrétiens. C'était donc un problème à la fois social et religieux.

Pour Paul, le problème se posait ainsi : Le salut est-il, le fruit de la grâce du Christ ? La circoncision est-elle nécessaire pour le salut ou la grâce du Christ suffit-elle? Cette question de principe était très importante. Une fois tranchée, Paul pourra permettre la pratique de la circoncision, comme ce sera le cas de Timothée, qui lui était d’une mère juive.

À Jérusalem, Pierre, Jacques et Jean acceptèrent le point de vue de Paul. L’Église naissante évita ainsi un conflit qui aurait été catastrophique et aurait relégué le christianisme au rang de «secte judaïsante».

Après la réunion, les apôtres et les anciens décidèrent d'envoyer à Antioche deux délégués, Judas et Silas, «personnages en vue parmi les frères», qui feront route avec Paul et Barnabé. On leur confia une lettre qui expliquait la proposition de Jacques : «L'Esprit Saint et nous avons décidé de ne vous imposer aucune autre charge que ces exigences inévitables : vous abstenir des viandes des sacrifices païens, du sang des animaux étouffés et de l'immoralité. Si vous évitez tout cela avec soin, vous aurez bien agi. Adieu!» (Actes 15, 28-29)

La formule de compromis arrêtée par Jacques fixe aux païens quatre interdits qui constituaient, selon la littérature rabbinique, les quatre exigences minimales imposées aux prosélytes en contact avec les Juifs : éviter de consommer les viandes sacrifiées aux idoles, s’abstenir des unions illégitimes (prostitution), ne pas manger des viandes non saignées et éviter de consommer du sang d’animaux. Ces restrictions visent à éviter que les non-Juifs soient cause de souillure pour leurs frères et soeurs judéo-chrétiens.

On en était ainsi arrivés à un compromis acceptable pour les deux groupes : Les non-juifs chrétiens acceptaient les règles énoncées par Jacques et les juifs-chrétiens n’obligeaient pas les non-juifs à se faire circoncire. Les deux groupes pouvaient ainsi se retrouver à la même table.

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