
26. La Phrygie et la région des Galates
08/11/2020 00:41Deuxième voyage missionnaire de Paul
26. La Phrygie et la région des Galates

Après le Concile de Jérusalem et la confrontation avec Pierre à Antioche de Syrie, Paul reprend sa tâche d'évangélisation. Le départ se situe probablement au printemps de l'année 49, saison où les armées partent en guerre, où les marchands s'en vont vers des terres étrangères. Paul ressent ce grand désir qui le porte toujours plus loin, vers l'Ouest : Derbé, Antioche de Pisidie, Éphèse, Thessalonique, Corinthe, Rome, l'Espagne.
Silas, son nouveau compagnon, était l'un des deux délégués de la communauté de Jérusalem, mandatés pour faire connaître les résultats du Concile. C’était un membre respecté de l’église-mère qui deviendra le camarade idéal : fidèle, généreux, prêt à tous les sacrifices, éloigné des étroitesses du judaïsme conservateur. Il avait été très proche de Pierre. Agent de liaison avec l'Église de Jérusalem, il était le signe visible de l’approbation que celle-ci accordait à la mission de Paul. De plus, il était citoyen romain, qualité précieuse vis-à-vis l'autorité publique.

Dans ce deuxième voyage, Paul voulait simplement visiter les communautés fondées au cours du voyage précédent. Lui et Silas empruntèrent la route du Nord. Traversant les Portes de Syrie, ils passèrent quelques jours à Tarse, pour se rendre ensuite dans la région où ils retrouvèrent les églises fondées par Paul trois ou quatre ans plus tôt.
Quand les Actes des Apôtres nous informent que Paul et Silas ont parcouru «la Phrygie et la région galate», il faut comprendre qu’ils n’ont fait que revisiter ces communautés fondées plus tôt : Derbé, Lystre, Iconium et Antioche de Pisidie situées en Galatie du Sud et à la frontière de la Phrygie et de la Lycaonie.
Les Églises de la Galatie étaient pleines de vitalité, à l’image de ce peuple établi dans la région depuis trois siècles. «Galates» est la forme grecque du nom «Gaulois». Vers l'année 280 av. J.-C., quelques tribus avaient quitté les environs de Toulouse pour se rendre aux pays du Danube. En traversant la Grèce, ils avaient pénétré en Asie Mineure. En chemin, ils pillèrent à coeur joie, et se fixèrent enfin sur les deux rives de l'Halys, où ils fondèrent les villes de Pessinonte, Ancyre (l'actuel Ankara) et Tavium. Leur dernier roi, Amyntas, s'était mis à la solde des Romains et avait étendu sa domination sur l'Arménie Mineure, la Pisidie, la Lycaonie et l'Isaurie.
Très tôt, ces tribus gauloises avaient éveillé chez les Grecs la peur et l'épouvante, détail que l’on retrouve dans l'art hellénique. En l'année 240 av. J-C., Attale 1er de Pergame avait réussi, par une éclatante victoire à chasser les Galates de son royaume. En souvenir il édifia sur l'Acropole d'Athènes un monument orné de nombreuses figures. Deux de ces très belles sculptures de l'école de Pergame «le Gaulois mourant» et «le groupe de Gaulois», se retrouvent aujourd’hui dans les musées de Rome et proclament le souvenir de l'invasion des Gaulois.
À la communauté de Derbé, Paul rappelle le piteux état dans lequel il était arrivé dans la bourgade, après avoir été lapidé à Lystres. Sa longue convalescence lui avait permis de faire un grand nombre de conversions. C'est en ce pays des Galates, qu'une maladie va le foudroyer et le clouer sur place. Évoquant plus tard ce triste épisode, il se rappellera l'état physique misérable dans lequel l'ont aperçu ses fidèles : «Si éprouvant pour vous que fût mon corps, vous n'avez montré ni dédain, ni dégoût. Au contraire, vous m'avez accueilli comme un ange de Dieu, comme le Christ Jésus. [...] Je vous rends ce témoignage : si vous l'aviez pu, vous vous seriez arraché les yeux pour me les donner.» (Galates 4, 14)

À Lystres, Paul rencontre de nouveau le jeune Timothée et le prend avec lui.
Timothée le suivra jusqu'à devenir plus tard évêque d'Éphèse et y mourrir martyr par lapidation.
À Lystres, lieu de la lapidation, Paul rencontrera de nouveau Timothée, le fils d’Eunice. Âgé maintenant de dix-huit ans, toujours fervent chrétien, le jeune homme lui rappelle la promesse faite trois ans auparavant. Paul se renseigne : «Sa réputation était bonne parmi les frères de Lystre et d'Iconium.» (Actes 16, 2). Paul décide donc de le prendre avec lui. Le père de Timothée était sans doute mort prématurément. Par amour pour lui, sa mère avait renoncé à la circoncision du jeune garçon. C'était pour Paul une difficulté, vu les exigences des Juifs et des judéo-chrétiens. Selon la Loi, l'enfant devait suivre la religion de sa mère et le fait que Timothée ne soit pas circoncis pouvait attirer les critiques et les persécutions. Paul n'aurait jamais pu l’emmener dans une synagogue sans offusquer les frères qu'il voulait gagner. Paul décida de le faire circoncire.
On se souvient qu’au Concile de Jérusalem, dans le cas de Tite, Paul avait refusé la circoncision, parce que celui-ci était de descendance païenne. Il l’avait fait pour une raison de principe. Le cas présent était différent. La cérémonie n'était qu'une question d'opportunisme et Paul n'avait pas l'habitude de trébucher sur des problèmes de moindre importance. Il n’avait jamais demandé aux Juifs de ne pas se faire circoncire. Ce qu'il ne trouvait pas raisonnable, c'était d'imposer cette loi aux païens convertis. C'était sagesse de sa part, autrement il aurait fallu «devenir Juif» avant de devenir chrétien.
Timothée deviendra un collaborateur exemplaire. Pendant les nombreuses maladies de l’Apôtre, lorsqu'il se sentait à bout de force, Timothée l’assistera de son aide et de son soutien. Il le suivra à Corinthe, Éphèse, Jérusalem et Rome. Connaissant bien le grec, il sera un excellent secrétaire. C'est le souvenir reconnaissant de tous ces services qui fera écrire à Paul, lors de sa première captivité à Rome, cette phrase émue : «Je n'ai vraiment personne qui saura comme Timothée s’intéresser d’un coeur sincère à votre situation... C’est comme un fils auprès de son père qu’il a servi avec moi la cause de l’évangile.» (Phil. 2, 19-22).



Après avoir visité les chrétiens d'Antioche de Pisidie, Paul hésite et se demandant quelle direction prendre. Il avait traversé, l'Asie Mineure du sud-est au nord-ouest, sans avoir de plan précis, sinon celui de visiter ses Églises. Il décida alors de se rendre à Troas, un port de mer important qui faisait le lien entre l’Europe et l’Asie. Au temps de Paul cependant, la notion d’Europe et d’Asie n’existait pas. On parlait simplement de différentes provinces romaines.
César Auguste avait fait de la ville de Troas une colonie de vétérans. C'est ainsi que Rome et la Grèce se donnaient la main. De nos jours, il existe encore des ruines imposantes, des aqueducs, des arcades, des colonnes de granit, des pierres de taille provenant du stade, ruines qui témoignent de la puissance de Rome à Troas. Dans ce port de mer, Paul créa une église qui se développa rapidement. Plus tard, il aura des collaborateurs de grande valeur, tel qu’Épaphrodite.
Troas est située sur la côte nord-ouest de l'Asie Mineure, à une quinzaine de kilomètres de l'antique Troie. Dans ce port, Paul rencontrera Luc, un autre disciple qui se joint à lui. Syrien d'Antioche et médecin de profession, il sera pendant une longue période associé à Paul et à son ministère. Il nous a laissé deux livres importants : l'Évangile qu'il a composé d'après les traditions de ceux qui avaient été dès le commencement les disciples de Jésus, et les Actes des Apôtres qu'il a rédigé après avoir été témoin du développement de l’église du premier siècle.
Il faut saluer le moment où Luc rencontre Paul à Troas. L’apôtre des nations deviendra son sujet de prédilection. Si Paul a pris peu à peu la place qu'il occupe dans les Actes, c'est grâce à cette rencontre. Selon les spécialistes, «l’évangéliste Luc est un lettré formé au grec littéraire.» (Édouard Belebecque) Il possède parfaitement la culture hellénique et s'exprime avec élégance. Il a écrit le grec le plus pur du Nouveau Testament. Il est conciliant et a un caractère plein de douceur. Grand admirateur de Paul, il resta toujours indépendant et mesuré dans ses paroles et dans ses écrits.

Eusèbe affirme que Luc était originaire d’Antioche de Syrie. Ses grandes connaissances nautiques permettent de conclure qu'il est né dans une ville maritime et qu'il a beaucoup voyagé, à l'instar des médecins grecs, qui étaient de grands voyageurs. À cette époque, Luc exerçait peut-être son métier dans le port de Troas. La rencontre de Paul et de Luc fut le point de départ d'une des amitiés les plus riches de l'histoire du christianisme. Luc sera, pour toutes les générations à venir, le disciple confiant, dévoué, doté de cette qualité rare qu'est l'admiration.
Dans les universités grecques, la médecine était aussi considérée que la philosophie. Luc occupait donc dans la société de son temps un rang social analogue à celui d'un médecin d’aujourd’hui. Les Romains par contre n’avaient aucun respect pour les médecins qu’ils considéraient comme des charlatans.
À partir de cette rencontre, nous voyons constamment Luc aux côtés de l'Apôtre. Il a partagé sa première et sa deuxième captivité à Rome. Paul mentionne Luc à trois reprises dans les Épîtres de la captivité : La première fois dans la lettre aux Colossiens : «Luc, le médecin bien-aimé, vous salue» (Col 4, 14). Cette phrase semble être l'écho de la profonde reconnaissance de Paul, si souvent malade, pour les soins médicaux de son fidèle ami. Dans sa lettre à Philémon, Paul le compte parmi ses collaborateurs. Lors de sa dernière captivité à Rome, il écrit mélancoliquement à Timothée : «Luc seul est avec moi» (2 Timothée 4, 11). Selon la tradition, après la mort de Paul, Luc aurait prêché l'Évangile en Achaïe et serait mort en Béotie, à un âge très avancé. Il aurait été enterré à Thèbes.
Grâce à Luc et à Paul, nous possédons deux tableaux de l'Église naissante : l'un dans les Épitres, où Paul s’exprime de façon passionnée, l'autre dans les Actes des Apôtres où Luc écrit d'une main plus égale, celle du chirurgien qui manie le bistouri et la plume avec la même assurance.
Pendant qu’il était à Troas, Paul fit un rêve dans lequel, lui et ses compagnons étaient invités à se rendre de l'autre côté du bras de mer reliant la Mer Égée à la Mer de Marmara. «Aussitôt, nous cherchâmes à partir pour la Macédoine, persuadés que Dieu nous appelait à y porter l'Évangile» (Actes 16, 9-10).
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