
Paul (2 de 6)
06/11/2018 08:02Paul (2).
6. Saul à Tarse et à Antioche de Syrie. Les renseignements manquent sur le début de cette période. Le séjour de Saul à Tarse dura probablement 6 ou 7 ans (voir la chronologie, à la fin de cet article). Le nouvel ouvrier accomplit sans doute un travail missionnaire et fonda probablement les Églises de Cilicie mentionnées incidemment dans #Ac 15:41. À Tarse, il dût se trouver en présence de divers courants intellectuels, et nous avons déjà dit que la ville était un centre de philosophie stoïcienne. L’entretien de l’apôtre avec des épicuriens et des stoïciens, à Athènes, prouve qu’il connaissait bien leurs systèmes (#Ac 17:18-19).Tout en annonçant l’Évangile à Tarse, Saul s’attendait sans doute à ce que le Seigneur lui montrât où il devrait poursuivre son ministère. Quelques chrétiens d’origine juive-helléniste, chassés de Jérusalem par la persécution consécutive au martyre d’Étienne, arrivèrent à Antioche de Syrie, sur l’Oronte, au nord du Liban. Le gouverneur romain de la province résidait alors dans cette ville, auparavant capitale du royaume de Syrie. Antioche comptait plus d’un demi-million d’habitants. L’une des principales cités de l’empire, et centre commercial à la population fort mélangée, elle exerçait une grande influence. À proximité de la Palestine et aux portes de l’Asie Mineure, entretenant des relations commerciales et politiques avec l’empire entier, cette ville était une base d’où la foi nouvelle, destinée à se séparer du judaïsme, devait partir à la conquête du monde. Les chrétiens réfugiés à Antioche annoncèrent l’Évangile aux « Grecs » (#Ac 11:20). Il y eut de nombreuses conversions : ainsi naquit, dans la métropole syrienne, une Église de chrétiens issus du paganisme. Quand l’Église de Jérusalem l’apprit, elle envoya Barnabas à Antioche. Avec une belle largeur de vue, celui-ci comprit que le Seigneur bénissait l’Église d’Antioche, quoique ses membres fussent incirconcis. Puis, discernant sans doute que le dessein de Dieu était d’envoyer Saul à Antioche, il alla chercher à Tarse l’ancien persécuteur et l’amena dans la métropole, où il travailla une année avec lui (#Ac 11:21-26). C’est à Antioche que l’on donna aux disciples, pour la première fois, le nom de « chrétiens », ce qui prouve le caractère non juif de cette communauté. L’apparition d’une congrégation composée de chrétiens issus du paganisme marque une grande étape dans l’histoire de l’Église. Ce devait être le point de départ des missions de Paul dans le monde païen.
Un prophète de Jérusalem, Agabus, vint prédire à l’assemblée qu’il y aurait une famine (#Ac 11:27,28). Les frères d’Antioche décidèrent de secourir les chrétiens de Judée. Ce témoignage de solidarité prouve que ces gentils se tenaient pour obligés envers ceux qui leur avaient transmis la foi nouvelle. Leur geste révèle aussi que l’Évangile renversa tout de suite les barrières de races et de classes. Barnabas et Saul apportèrent aux anciens de l’Église de Jérusalem les dons des chrétiens d’Antioche pour ceux de Judée (#Ac 11:29,30). Cette visite de Saul à Jérusalem se situe probablement en 44 après Jésus-Christ, ou un peu plus tard. La lettre aux Galates ne la mentionne pas, sans doute parce que Saul ne rencontra alors aucun des apôtres. Certains exégètes ont tenté d’assimiler ce séjour à celui que rapporte #Ga 2:1-10, mais ce passage des Galates concerne évidemment un autre voyage, qui eut lieu après la discussion sur la circoncision des païens. Or Luc place le début de cette controverse (#Ac 15:1,2) à une époque plus tardive que l’an 44. Paul, écrivant aux Galates, récapitule les occasions où il fit valoir son Évangile auprès des apôtres de la première heure, lesquels l’approuvèrent. D’après Luc (#Ac 11:30), Paul ne rencontra cette fois-ci que les anciens de l’Église de Jérusalem et se borna à leur remettre des fonds. L’argumentation de Paul dans #Ga 2:1-10 n’exige pas la mention d’une simple visite de charité. Lui et Barnabas revinrent de Jérusalem à Antioche, avec Jean, surnommé Marc (#Ac 12:25).
7. Le premier voyage missionnaire de Paul. Le Saint-Esprit révéla aux prophètes de l’Église d’Antioche que Paul devait entreprendre un apostolat itinérant (#Ac 13:1-3) ; il leur ordonna aussi de mettre à part Barnabas et Paul pour l’œuvre à laquelle Dieu les appelait. La date précise de ce voyage n’est pas connue. On le situe entre 45 et 50 après Jésus-Christ ; peut-être eut-il lieu entre 46 et 48. Nous ne savons pas non plus quelle fut sa durée. Barnabas, plus âgé, dirigeait le voyage ; mais Paul, très éloquent, fut bientôt au premier plan ; Jean-Marc les accompagnait. Le petit groupe alla d’Antioche à Séleucie, à l’embouchure de l’Oronte. Là il fit voile pour l’île de Chypre, pays d’origine de Barnabas. Les 3 chrétiens débarquèrent à Salamine, sur la côte orientale de Chypre et se mirent à annoncer l’Évangile dans les synagogues. Ils traversèrent toute l’île, atteignirent le port de Paphos, au sud-ouest Sergius Paulus, proconsul romain résidait dans cette ville ; il s’intéressa à l’Évangile. Un faux prophète juif, Bar-Jésus, s’intitulant Élymas (le magicien) et jouissant de la faveur du proconsul, s’opposa violemment à la Parole de Dieu (#Ac 13:6-8). Paul, indigné, apostropha le magicien et lui déclara que le Seigneur le frapperait de cécité. Témoin de l’intervention de Dieu et attentif à l’enseignement des missionnaires, Sergius Paulus ouvrit son cœur à la foi chrétien (#Ac 13:9-12). Le groupe, dirigé ensuite par Paul (#Ac 13:13), fit voile vers l’Asie Mineure et arriva à Perge en Pamphylie. C’est là que Jean-Marc, nous ne savons pourquoi, refusa de poursuivre le voyage et retourna à Jérusalem. Il ne paraît pas que Paul et Barnabas aient séjourné à Perge ; s’avançant vers le nord, ils pénétrèrent en Phrygie et gagnèrent Antioche de Pisidie, capitale de la province romaine de Galatie. Les missionnaires se rendirent à la synagogue, où les chefs les invitèrent à parler. Paul prononça alors le grand discours résumé dans #Ac 13:16-41. Après avoir dit que Dieu a conduit Israël et l’a préparé à recevoir le Messie, Paul rappelle le témoignage de Jean-Baptiste, et le rejet de Jésus par les autorités juives. L’apôtre déclare que Dieu a ressuscité Jésus, en qui se sont accomplies les antiques promesses faites à Israël ; il ajoute que seule la foi en Jésus justifie le pécheur ; il exhorte les Juifs à ne pas prendre la même attitude que les chefs meurtriers de Jérusalem. Ce discours suscita l’hostilité des notables juifs, mais convainquit beaucoup d’Israélites pieux, et surtout des gentils, qui avaient subi l’influence du judaïsme. Ces prosélytes permirent à Paul de trouver en tous lieux le contact entre la synagogue et le monde païen. Le sabbat suivant, les missionnaires injuriés rompirent avec la synagogue et s’adressèrent directement aux païens. L’Évangile se répandit dans toute la contrée, mais les autorités d’Antioche de Pisidie, alertées par les Juifs, expulsèrent Paul et Barnabas (#Ac 13:50). Ils allèrent à Icone, ville de Phrygie, où il y eut de nombreuses conversions de Juifs et de païens (#Ac 13:51-14:1). Les Juifs demeurés hostiles soulevèrent une partie de la ville contre les missionnaires qui gagnèrent Lystre, puis Derbe, cités importantes de la Lycaonie (#Ac 14:2-6). À Lystre, Paul guérit miraculeusement un homme qui n’avait jamais marché. La foule, s’imaginant avoir affaire à Jupiter et à Mercure, voulut leur offrir des sacrifices. Barnabas et Paul s’y opposèrent. Paul prononça le discours contre l’idolâtrie que résument #Ac 14:15-18. C’est le 2e des discours de Paul rapportés par Luc. La conversion de Timothée se produisit sans doute à Lystre (cf. #Ac 16:1 ; #2Ti 1:2; 3:11). Les Juifs d’Antioche et d’Icone vinrent y ameuter la populace. Paul fut lapidé, traîné hors de la ville, et laissé pour mort (#Ac 14:19). Dieu le ranima, et il se rendit avec Barnabas à Derbe, probablement à la frontière sud-est de la province de Galatie (#Ac 14:20). En gagnant la Cilicie par les montagnes, les missionnaires auraient pu aller à Tarse et rentrer directement à Antioche de Syrie, après avoir suivi un itinéraire circulaire. Mais ils tenaient à affermir les nouvelles Églises avant de revenir à Antioche de Syrie. Ils retournèrent donc de Derbe à Lystre, à Icone, à Antioche de Pisidie, et à Perge consolidant les Églises et fortifiant les disciples. Ils s’arrêtèrent à Perge pour y prêcher, ce qu’ils n’avaient probablement pas fait lors de leur passage précédent. Ils descendirent ensuite à Attalie port de Perge, et s’embarquèrent pour Antioche de Syrie (#Ac 14:21-26). Ainsi se termina le premier voyage missionnaire de Paul, qui avait parcouru des contrées situées immédiatement à l’ouest de celles où l’Évangile s’était déjà implanté. La méthode de l’apôtre était de présenter l’Évangile d’abord aux Juifs, puis aux païens. Il découvrit que le judaïsme avait déjà influencé un grand nombre de gentils et les avait préparés à accepter le christianisme. Cette méthode consistait aussi à fonder des Églises dans les principales villes, dont l’accès était facilité par les excellentes routes que le gouvernement romain avait fait construire pour relier les postes militaires. Le grec était compris partout : Dieu avait ouvert la voie au héraut de l’Évangile.
8. Le conflit avec les chrétiens judaïsants : conférence de Jérusalem. Le succès du travail de Paul parmi les païens provoqua cependant un conflit au sein de l’Église. Certains chrétiens d’origine juive, encore attachés à la Loi mosaïque, vinrent de Jérusalem à Antioche dire aux convertis sortis du paganisme que le salut dépendait de la circoncision (#Ac 15:1). Quelques années auparavant, Dieu s’était servi de Pierre pour révéler à l’Église qu’elle ne devait pas contraindre les disciples d’origine païenne à l’observance de la Loi mosaïque (#Ac 10:1-11:18). Mais les chrétiens judaïsants, la plupart pharisiens convertis (#Ac 15:5), ne suivirent pas les instructions de Pierre. Quand l’Église d’Antioche apprit ce qu’ils enseignaient, elle envoya Paul, Barnabas et quelques frères à Jérusalem, soumettre la question aux apôtres et aux anciens (#Ac 15 ; #Ga 2:1-10 ; ces deux relations concordent entièrement, malgré la différence de perspective des écrivains). Paul dit qu’il se mit en route après une révélation directe de Dieu (#Ga 2:2). L’avenir de la nouvelle religion était en jeu. La fidélité à la doctrine chrétienne et la charité triomphèrent. Paul et Barnabas exposèrent à l’Église de Jérusalem l’œuvre que Dieu avait accomplie par leur moyen. Les chrétiens judaïsants répondirent en proclamant de nouveau la nécessité de la circoncision, de la Loi mosaïque, ce qui obligea les apôtres et les anciens à se réunir pour résoudre le problème (#Ac 15:6-29). Pierre leur rappela que Dieu avait révélé sa volonté à cet égard quand Corneille s’était converti, et que les Juifs eux-mêmes n’avaient pu porter le joug de la Loi. Paul et Barnabas montrèrent combien Dieu avait béni leur travail auprès des païens. Jacques, le frère du Seigneur, déclara que les prophètes de l’ancienne Alliance avaient prédit que les païens seraient appelés. On résolut de reconnaître comme frères les convertis incirconcis, en les libérant de la Loi, mais en leur demandant de renoncer à certaines pratiques qui heurtaient les Juifs. Dans l’épître aux Galates, Paul dit que l’Église de Jérusalem le soutient contre les « faux frères », et que Jacques, Pierre et Jean lui donnèrent la main d’association, reconnaissant que Dieu, qui les avait chargés de l’apostolat parmi les Juifs, avait commandé à Paul et à Barnabas d’évangéliser les païens. Paul restait donc en communion avec les apôtres, tout en ayant la liberté de poursuivre sa mission. Les judaïsants montrèrent à quel point ils étaient acharnés, en manifestant plus tard de l’hostilité et même de la haine envers Paul, dont l’opinion avait prévalu. L’argumentation de l’ancien pharisien avait sauvegardé l’unité de l’Église et la liberté des convertis incirconcis. La solution trouvée évitait de heurter de front certaines coutumes israélites, tout en libérant les chrétiens d’origine païenne des rites du judaïsme. La controverse recommença cependant peu après à Antioche (#Ga 2:11-21). Pierre, venu dans la métropole de la Syrie, participait comme Paul aux repas des chrétiens incirconcis. Après l’arrivée de certains Juifs de Jérusalem, Pierre, et même Barnabas, cessèrent de manger avec les païens convertis. Paul tança Pierre publiquement, et réaffirma les principes doctrinaux sur lesquels reposaient les droits des gentils dans l’Église : le salut ne s’obtient que par la foi en Christ, car le chrétien, crucifié avec Christ, est mort à la Loi mosaïque. En mourant, Christ a accompli pour son peuple toutes les obligations légales. Il suffit de croire en Christ de tout son cœur pour devenir chrétien ; il n’y a pas d’autre condition à remplir. Paul savait qu’il ne s’agissait pas seulement de l’unité dans l’Église, mais du fondement de l’Évangile. En défendant le principe du salut par la foi et en faisant connaître partout la bonne nouvelle, Paul contribua plus que n’importe qui à faire du christianisme une religion universelle. La conférence de Jérusalem eut probablement lieu en 48 ou 49 après Jésus-Christ ; voir la chronologie à la fin de cet article (voir l’article suivant pour la suite).
Papyrus contenant des passages des épîtres de Paul aux Éphésiens et aux Galates en grec. 3e siècle après Jésus-Christ.
Copyright Editions Emmaüs
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