Proverbes le livre des

24/07/2017 14:43

Proverbes (Livre des).

 

      Auteur.

 

      Contrairement aux autres livres bibliques (sauf celui des Psaumes), les Proverbes ne se présentent pas comme l’œuvre d’un seul auteur ; le livre en nomme trois : Salomon (#Pr 1:1; 10:1; 25:1), Agour (#Pr 30:1), Lémouel (#Pr 31:1), et mentionne des « hommes sages » qui ont composé d’autres proverbes (#Pr 22:17). Une note éditoriale (#Pr 25:1) nous montre que la collection a été composée assez tard.

 

      Agour et le roi Lémouel ne sont pas connus par l’histoire d’Israël. Nous avons dans ces mentions un témoignage de l’universalisme du livre, qui présage celui de la Bible entière, livre pour toute l’humanité.

 

      Dans le peuple d’Israël, les sages constituaient un groupe à part (#Esa 29:14) qui réfléchissait aux applications de la foi dans la vie courante. Il existait un conseil permanent de sages à la cour du roi David (#1Ch 27:32-33). Les sacrificateurs et, plus tard, les scribes veillaient à l’application de la Loi contenue dans les livres de Moïse. Les prophètes avaient leur message sur la relation avec Dieu. Les sages concentraient essentiellement leur réflexion sur la deuxième table de la Loi, c’est-à-dire sur celle qui définit les relations humaines. Devant tout problème d’ordre moral, social, artistique ou politique, le sacrificateur ou le scribe demandait : Que dit la Loi ? Le prophète cherchait une parole de Dieu pour son temps. Le sage posait la question : Est-ce sagesse ou folie ? La conjugaison des trois voies convergentes (#Jér 18:18) apportait la réponse conforme à la volonté de Dieu.

 

      Un certain nombre de ces proverbes ont dû être transmis durant des générations par voie orale. Salomon, Agour, Lémouel et les « hommes sages » anonymes les ont rassemblés, ciselés, rédigés, et y ont ajouté ceux qu’ils ont dégagés de leurs propres observations, mais Salomon a certainement joué le rôle capital : #1R 5:12 lui attribue 3000 proverbes ; n’oublions pas que Dieu l’avait doté d’une sagesse sans pareille (#1R 5:11). L’introduction (#Pr 1:1-6) s’applique à l’ensemble du recueil ; l’éloge de la sagesse (#Pr 1:7-9:18) constitue une sorte de préface aux proverbes spécifiquement attribués à Salomon, mais on ne peut prouver que ces premières pages ne lui soient pas dues également (cf. #1R 5:12). #Pr 10:1-22:16; 25:1-29:2, c’est-à-dire presque les 2/3 du livre, sont formellement attribués à Salomon. Les attaques contre l’idolâtrie ne figurant pas dans ces sections, on a voulu en déduire que ces proverbes furent composés ou réunis après le grand combat des prophètes contre la vague de paganisme de leur époque. Cependant, on peut tout aussi bien alléguer que ces sections datent d’avant cette lutte.

 

      Date.

 

      Salomon a vécu au 10e siècle avant Jésus-Christ. Certains proverbes ont été rassemblés par le roi Ézéchias (#Pr 25:1) au 8e et début du 7e siècle. Peut-être quelques-uns ont-ils été ajoutés pendant ou après l’exil. La collection complète a dû exister en tout cas à partir du 5e siècle. La langue des #Pr 10:1-22:16; 25:1-29:2 est un hébreu remarquablement pur, constatation étayant l’opinion que Salomon en est l’auteur. Certaines œuvres, écrites immédiatement avant l’exil, ou postérieures à celui-ci, présentent des infiltrations étrangères, que l’on ne rencontre jamais dans l’orthographe et le style des sections en question. D’ailleurs, les arguments linguistiques ont amené les critiques à des conclusions si contradictoires qu’elles s’annulent mutuellement. Ainsi Eichhorn date le livre du 10e siècle avant Jésus-Christ, Hitzig du 9e, et Ewald du 6e.

 

      Lieu.

   La recherche de la sagesse était répandue dans tout le monde antique. La Bible fait souvent allusion aux sages des nations voisines, à ceux d’Égypte (#1R 4:30 ; #Esa 19:11-12), d’Édom, et d’Arabie (#Jér 49:7 ; #Ab 1:8), de Babylonie (#Esa 47:10 ; #Da 1:4,20) et de Phénicie (#Ez 28:3 ; #Za 9:2). Il y avait des échanges entre les sages d’Israël et ceux des pays voisins (#1R 4:30-34; #1R 10:1-9,23-24). Aussi, les livres de sagesse sont-ils ceux qui ont le plus de points communs avec la littérature extrabiblique.

 

      La collection des Proverbes a, bien entendu, été composée en Juda.

 

      Contenu.

 

      Le livre des Proverbes est une collection de machals, c’est-à-dire de pensées, de sentences et de maximes reposant sur des expériences de vie. Il nous offre la fine fleur de la sagesse antique distillée pendant de longues générations. Mais qu’est-ce que la sagesse ? Les premiers versets  —  qui sont, en fait, le titre détaillé de l’ouvrage  —  lui donnent pour synonymes : le discernement, la prudence, la réflexion, le bon sens, la connaissance. Ils en définissent clairement la fonction : elle nous fait savoir en toute circonstance « ce qu’il est juste et correct de faire, trouver les bonnes directives de conduite et agir en connaissance de cause ». C’est pourquoi elle est si précieuse (#Pr 3:14-17).

 

      Le mot hébreu pour sagesse (hokma) vient de la racine verbale hakam : être solide. Il ne désigne pas tant la recherche de la vérité que les résultats fermes et fixes auxquels on est arrivé dans le domaine de la connaissance religieux et morale. Ces résultats peuvent être incomplets encore, mais ils sont assurés ; car, d’une part, il existe une souveraine sagesse en dehors de l’homme et au-dessus de lui (#Pr 8:22 et suivant voir #Job 28:25-27), qui a supervisé la création du monde (#Jér 10:12) et qui préside à l’histoire de l’humanité (#Pr 8:16), et d’autre part, l’homme a la faculté de percevoir cette sagesse parfaite : l’esprit de l’homme est une lampe de l’Éternel (#Pr 20:27). La sagesse n’est pas la science pour la science, mais l’art de profiter de ses connaissances et de savoir les appliquer dans la vie courante. Il s’agit donc d’une sagesse toute pratique. Comme la lumière du soleil, cette sagesse se divise en un prisme aux couleurs variées : elle est instruction (mûsar, #Pr 1:2,3), c’est-à-dire qu’elle doit être acquise par un effort persévérant, accompagné, au besoin, de la correction (tôkahat, #Pr 1:23; 3:11), c’est-à-dire de la persuasion verbale, la répréhension qui fait appel à la conscience et à la raison (voir #Esa 1:18). Les deux ensembles constituent la discipline qui consiste avant tout à savoir se garder des influences pernicieuses du dehors et des tendances mauvaises que l’on trouve en soi.

 

      Positivement vue, la sagesse est aussi intelligence, compréhension, entendement (binâ, #Pr 1:26), c’est-à-dire aptitude à saisir les rapports entre les choses, à distinguer le bien du mal ; prudence, discernement (horma, #Pr 1:4), c’est-à-dire finesse, capacité de déjouer les ruses des autres ; savoir (leqah, #Pr 1:5), connaissance (da’at) de la vérité et de Dieu (#Pr 2:5; 3:6), réflexion (m’zimmâ, #Pr 1:4), bon sens (haskil, #Pr 1:3), c’est-à-dire perspicacité, capacité de voir comment sont les choses, de percevoir leur véritable nature et même : adresse, habileté (rahbullôt, #Pr 1:5) pour savoir se gouverner soi-même, se conduire dans la vie. Cette simple énumération nous montre que la sagesse englobe toutes les fonctions mentales et tous les aspects de la vie.

 

      La personnification de la sagesse (#Pr 8) nous aide à comprendre qu’elle n’est qu’un attribut de la Personne divine, qu’elle est liée de toute éternité à Dieu et qu’elle ne peut être comprise qu’en relation avec lui. C’est pourquoi « la crainte de l’Éternel », c’est-à-dire une attitude de respect devant lui, est le commencement, le principe et le moteur de toute sagesse (#Pr 1:7). Dans la perspective du Nouveau Testament, nous pouvons y voir une préfiguration du Fils (voir #Pr 8:22,27-30) ou du Saint-Esprit.

 

      Par l’inclusion de ce livre dans le canon des Saintes Écritures, Dieu a marqué du sceau de son autorité ces produits de l’expérience humaine. Ainsi avons-nous dans les Proverbes, non seulement un art de vivre qui a fait ses preuves au travers de nombreuses générations, mais l’art de vivre selon Dieu.

  But.

 

      L’auteur parle comme un père à son fils, il veut l’instruire, c’est-à-dire lui communiquer le fruit de l’expérience des générations passées, mais il veut aussi stimuler sa réflexion personnelle pour qu’il soit à même de « comprendre le langage de la raison », de discerner son chemin dans le dédale des routes qui se présentent à lui et de « pénétrer les sentences énigmatiques des sages ». Il s’adresse à la fois à ceux qu’il appelle « les simples », c’est-à-dire les gens sans expérience, les adolescents, comme tous ceux qui ont le cœur ouvert, et aux « hommes avisés » qui peuvent enrichir encore leur savoir en prenant ses conseils à cœur.

 

      La question essentielle qui préoccupait les sages d’autrefois était : Comment réussir sa vie ? Or, la vie est faite d’une multitude de petites et de grandes décisions face aux problèmes quotidiens. Les Proverbes, précisément, touchent à tous les domaines de notre existence : vie individuelle, familiale, sociale, économique, politique …  Relations parents-enfants, homme-femme, patrons-employés, bons-méchants, riches-pauvres …  Car la sagesse se démontre dans tous ces secteurs : elle tire de l’adoration et de l’engagement envers Dieu les conséquences logiques pour la vie de tous les jours. Elle donne la capacité de juger ce qui est juste (#Pr 2:6-22) et de prendre la bonne attitude envers les possessions matérielles (#Pr 3:9-10), le travail (#Pr 6:6-11), les voisins (#Pr 3:27-29), la femme fidèle (#Pr 31:10-31) ou frivole (#Pr 6:20-35; 9:13-18), etc. … 

 

      Dans l’Ecclésiaste, Salomon proclamait : « Il n’y a rien de nouveau sous le soleil ». Dans leur essence, les problèmes de l’homme du 21e siècle sont les mêmes que ceux des contemporains du Grand Roi israélite. Aussi croyons-nous que la sagesse enseignée par ce livre puisse équiper tout homme et le rendre capable d’affronter les différents problèmes qu’il pourra rencontrer sur sa route. À un ami qui lui demandait des conseils au sujet de l’éducation de sa fille, Jérôme répondit : « Qu’elle possède d’abord le livre des Psaumes pour la sainteté du cœur et qu’elle soit instruite dans les Proverbes de Salomon pour une vie pieuse ».

 

      « Si le monde était gouverné par la sagesse de ce seul livre, il serait sans aucun doute une nouvelle terre où habite la justice » (Ch. Bridges).

 

      Plan.

 

      La forme littéraire des proverbes est le machal (d’un verbe hébreu signifiant ressembler). Le machal associe deux choses qui se ressemblent : une réalité concrète et un fait moral : « De l’eau fraîche pour une gorge altérée, telle est une bonne nouvelle venant d’un pays lointain » (#Pr 25:25 cf. #Pr 25:19).

 

      La leçon peut s’exprimer de bien des manières : par identité (#Pr 29:5), par contraste (#Pr 27:7) ou par similitude (#Pr 25:4-5), par des classifications (#Pr 14:15) ou des évaluations (#Pr 22:1), en montrant les conséquences d’un comportement (#Pr 20:4) ou son absurdité (#Pr 17:16). Le machal présente un certain nombre de caractéristiques qui le distinguent des genres littéraires analogues.

1. Il est court, ramassant le fruit de l’expérience sous une forme condensée. Il se situe donc dans la lignée des proverbes de tous les temps et des maximes anciennes et modernes. C’est pourquoi il atteint son but : avant qu’on ait eu le temps de réaliser ce qui s’est passé, il s’incruste dans la mémoire pour agir au moment du choix (#Pr 22:1).

2. Il est fondé sur l’observation dans divers domaines de la vie : économique, botanique, zoologique (voir #1R 5:13 ; #Pr 30:24-31), comportement humain … 

3. Généralement, il est tiré de l’expérience personnelle de Salomon ou des sages anonymes (#Pr 21:19; 22:10; 23:1-3,5 … ).

4. Il est centré sur l’homme et relève son importance. C’est pourquoi le livre des Proverbes a un caractère universel très différent de la plupart des autres livres de l’Ancien Testament.

5. Le machal est souvent énigmatique pour stimuler la réflexion (cf. #Jug 14:10-12 ; #Pr 26:1,4-5,22; 30:24-28,29-31).

6. C’est une vérité éprouvée par le temps : beaucoup de ces observations ont été confirmées par l’expérience de nombreuses générations de sages. En cela, les Proverbes se distinguent de la plupart de nos systèmes philosophiques ou pédagogiques fort ingénieux mais qui ne résistent pas à l’épreuve de l’expérience et du temps.

 

 

      À ces caractéristiques communes à tous les machals du Moyen-Orient et, en partie, aux proverbes de tous les pays, le machal biblique ajoute un avantage essentiel : il a bénéficié de l’inspiration divine. Le principal artisan du livre des Proverbes, Salomon, a aussi composé des Psaumes et prononcé la prière de dédicace du Temple qu’il a bâti à la gloire de Dieu. « La plume est celle du roi d’Israël, mais les paroles sont celles de Dieu » (Ch. Bridges).

 

      La structure poétique la plus courante du machal est le distique, c’est-à-dire le proverbe à deux lignes. Le distique a quatre variantes :

 

a) Le parallélisme synonymique où la deuxième ligne répète la même vérité que la première avec des mots différents (exemple : #Pr 2:11 ; cf. #Pr 11:25; 16:13,16,18).

b) Le parallélisme antithétique : la deuxième ligne énonce la vérité contraire à celle de la première ligne (exemple : #Pr 11:7, cf. #Pr 10:1-28).

c) Le parallélisme synthétique où la deuxième ligne étend le sens de la première en ajoutant une idée nouvelle (exemple : #Pr 10:18 ; cf. #Pr 26:11).

d) La comparaison : l’illustration d’une idée dans la première ou la deuxième ligne (exemple : #Pr 25:23 cf. #Pr 18:20-23). Parfois, le proverbe s’énonce en quatre lignes construites sur le principe du parallélisme synonymique (#Pr 23:15-16; 24:3,4), synthétique (#Pr 30:5-6) ou comparatif (#Pr 25:16-17), six lignes (dont les deux premières constituent généralement un prologue : #Pr 23:19-21), huit (#Pr 23:22-25) ou plus (odes machaliques fréquentes dans #Pr 1:7-9:18; 22:17-21; 30:7-9).

 

 

      Les chapitres 1-9 constituent une introduction à tout le livre. Après le titre (#Pr 1:1-6), une série de seize exhortations adressées par le père à son fils louent la sagesse et dénoncent les différentes conséquences auxquelles s’expose celui qui la méprise. Le premier chapitre présente les thèmes que développeront les chapitres suivants. #Pr 1:8-9 : l’importance de l’instruction (reprise dans les chapitres 2 à 4) ; #Pr 1:10-19 : mises en garde (reprises chapitres 5-7) ; #Pr 1:20-33 : appel de la sagesse (repris chapitres 8-9). Le chapitre 8 est certainement le sommet du livre et l’un des chapitres les plus importants de tout l’Ancien Testament, qui se rapproche le plus du Nouveau Testament. Il a inspiré le prologue de l’évangile de Jean et le passage christologique célèbre de #Col 1:15 et suivant. À diverses reprises, Jésus-Christ est appelé : la Sagesse (#1Co 1:24,30 ; #Col 2:3) : preuve que tout ce poème a un caractère fortement prophétique et messianique.

 

      Après ce prologue, les machals se suivent sans ordre apparent. La majeure partie du livre est constituée par deux collections de proverbes : de Salomon (#Pr 10:1-22:16), d’Ézéchias (#Pr 25:1-29:27) entrecoupées de deux groupes de maximes intitulées : « paroles des sages » (Pr 22:17-24:22; 24:23-34). Suivent les Paroles d’Agour et du roi Lémouel. Le recueil se termine par l’éloge de la femme vaillante, un poème alphabétique anonyme. Les répétitions plus ou moins textuelles de certains proverbes sont un indice indubitable de la pluralité d’auteurs, attestée d’ailleurs par les titres des divers recueils qui constituent le livre.

      Note archéologique.

 

      D’autres peuples de l’Ancien Orient-Sumériens, Assyriens, Babyloniens, Égyptiens, etc.  —  possédaient aussi leurs recueils de proverbes. Les similitudes de fond et de forme entre ces proverbes et ceux de la Bible sont parfois étonnantes, prouvant que toute cette littérature de sagesse provient d’un même milieu littéraire et culturel. Un ou deux exemples aideront à le comprendre ; ils viennent de la Sagesse d’Amen-em-opé, 7-6e siècle avant Jésus-Christ ; d’autres la dateraient du 11e siècle.

 

      #Pr 11:1 : « La balance fausse est en horreur à l’Éternel, mais le poids juste lui est agréable. »

 

      Amen-em-opé, chapitre 17, lignes 17-18 : « Ne fausse pas la balance et n’altère pas le poids. »

 

      #Pr 22:29 : « Si tu vois un homme habile dans son ouvrage, il se tient auprès des rois. »

 

      Amen-em-opé, chapitre 18, lignes 16-17 : « Un scribe versé dans son art se trouve digne d’être à la cour. »

 

      Cependant, les ressemblances dans le contenu et dans le style (genre littéraire), existant entre la littérature sapientielle biblique et la sagesse profane du Proche-Orient, n’empêchent en rien l’inspiration du Saint-Esprit chez les auteurs bibliques. De toute façon, il a toujours existé une certaine morale universelle, commune à tous les peuples d’autrefois et d’aujourd’hui. Sans elle une vraie vie de société serait impossible. Nous croyons que le Saint-Esprit inspirait l’auteur des Proverbes en le guidant dans le choix parmi les 3000 sentences composées par Salomon (#1R 5:9-14) ainsi que pour la forme finale à leur donner. Mais il pouvait aussi lui inspirer de nouveaux proverbes pendant qu’il travaillait sur les autres.

 

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