Samuel (Livres de).

25/11/2015 17:19
Samuel (Livres de). 
 
      Titre et présentation. 
 
      Les livres portent le nom de leur personnage principal (comme ceux d’Esther, de Jonas … ). Ils constituaient primitivement un seul volume (les Massorètes signalent que #1S 28:24 est le verset central du livre). Des manuscrits hébreux et Josèphe le confirment. La division en deux tomes fut introduite par la Septante, reprise par la Vulgate et adoptée par Daniel Bamberg lorsqu’il publia sa Bible hébraïque à Venise en 1517. Depuis lors, cette division figure dans toutes les Bibles. D’ailleurs, dans la Septante, ces livres constituaient les deux premiers tomes des 4 livres des Règnes (baptisés livres des Rois dans la Vulgate). Ils figurent encore sous ce nom dans certaines Bibles. Le texte trouvé à Qumrân montre que les Septante disposaient d’un manuscrit plus proche de l’original que les Massorètes. 
 
      Auteur. 
 
      L’auteur de ces livres nous est inconnu. La tradition rabbinique les attribuait à Samuel, mais le Talmud babylonien faisait remarquer qu’il ne saurait être l’auteur de tout l’ouvrage puisqu’il meurt dans #1S 25. Il a certainement joué un rôle dans la rédaction des chapitres 1-24 puisque #1Ch 29:29 parle des livres des prophètes Samuel et Gad. Mais comme le livre présente une grande unité littéraire, ce qui implique un rédacteur unique, il semble préférable de supposer que celui-ci s’est servi des documents rédigés par ces prophètes. D’autre part, #1S 10:25 mentionne un livre où il consigna les droits du roi. Probablement, Nathan et Gad et des élèves de l’école de prophètes qu’il avait fondée, puis les secrétaires et les archivistes de David (#2S 8:16-17), ont continué à rédiger les documents qui serviront au rédacteur final à constituer cette histoire. #2S 1:18 mentionne l’une des sources (le livre du Juste), #1Ch 27:24; 29:29 en cite quatre autres. 
 
   Citons encore #/APCJ 2Ma 2:13 : « Néhémie, pour fonder une bibliothèque, rassembla les livres qui concernaient les rois et les prophètes, et les livres de David ». Nos 2 livres de Samuel devaient sans doute se trouver dans cette collection, et par conséquent faire partie du Canon avant l’époque des Maccabées. La rédaction de 1 et 2 Samuel semble avoir été faite au début de la monarchie, sur la base des documents de première main mentionnés ci-dessus. Kirkpatrick admet comme substantiellement exacte la tradition attribuant à Samuel lui-même #1S 1:1-24:2 et le reste à Nathan et à Gad. Il ajoute : si ce livre a été rédigé au moyen des chroniques de Samuel, de Nathan et de Gad, et complété par des documents conservés dans des écoles de prophètes, il provient donc des meilleures sources possibles (Cambridge Bible). 
 
      Malgré cela, certaines critiques pensent voir dans l’ouvrage l’amalgame de 2 (ou 3) sources divergentes, semblables à celles du Pentateuque. Pour le yahviste au 10e siècle, Samuel serait un voyant inconnu, pour l’élohiste au 8e siècle, un grand héros national. Plus tard encore, des adjonctions auraient été faites, et au 6e siècle un rédacteur « deutéronomique » aurait modifié certains passages selon ses convictions. La réalité est que seuls quelques points sont difficiles à expliquer, ce qui n’est pas étonnant pour un livre aussi ancien. 
 
1. La double présentation de David à Saül (#1S 16:17-23; 17:55-58). Dans le premier passage, il suffit au roi d’avoir ce jeune joueur de harpe qui le distrait ; tandis qu’au moment de donner sa fille au vainqueur de Goliath, Saül réalise qu’il veut en savoir bien plus sur le père et la famille de David.
2. Le double récit de la mort de Saül semble contradictoire (#1S 31:4-5 ; #2S 1:6-10). Il est possible que la description de l’Amalécite soit de pure invention ; ou bien que le roi, n’ayant que partiellement réussi sa tentative de suicide, ait demandé à cet étranger de l’achever.
3. Le proverbe « Saül est-il aussi parmi les prophètes ? » est cité 2 fois (#1S 10:11; 19:24) ; il peut très bien avoir tiré son origine de ces 2 circonstances répétées.
4. D’autres critiques encore voient des « doublets » dans les 2 occasions où David épargne la vie de Saül (#1S 24:7; 26:9). Mais pourquoi un tel exemple de magnanimité n’aurait-il pas pu se produire 2 fois, surtout si l’on pense que les persécutions de Saül contre David durèrent plus de 10 ans (#2S 5:4). Quoi qu’il en soit, ces points secondaires ont peu de poids en face de l’homogénéité du récit, du style et du plan. On a pu dire que le livre de Samuel est l’un des meilleurs ouvrages en prose de la littérature hébraïque.
 
     Date. 
 
      #1S 27:6 parle des rois de Juda auxquels Tsiqlag a appartenu jusqu’à aujourd’hui. Le livre n’a donc pas été rédigé dans sa forme actuelle avant le schisme. D’autre part, les détails géographiques rigoureusement exacts, l’absence de noms composés avec Baal et l’allusion à la chute de Samarie (722) font opter pour une date de rédaction assez ancienne, peut-être au 9e ou 10e siècle avant Jésus-Christ  —  du moins pour les documents qui ont servi au rédacteur final. Si le but de 1 et 2 Samuel est de défendre le choix de la dynastie de David, sa rédaction se justifie surtout après le schisme. En effet, cette question qui divisait le pays, continuait à créer des tensions entre les deux royaumes. 
 
      Ces livres couvrent un bon siècle d’histoire, de la naissance de Samuel (environ 1105) à la mort de David (970) avec, comme jalons intermédiaires : l’onction de Saül (1050), celle de David (1025), la mort de Saül et le début du règne davidique à Hébron (1010) puis à Jérusalem (1003). 
 
      Lieu. 
 
      Samuel est né à Rama à une dizaine de km au nord de Jérusalem. Une bonne partie des récits gravite autour de cette ville et de Béthel à 8 km plus au nord. 
 
      Contenu. 
 
      Sujet principal : l’introduction et l’établissement de la royauté en Israël : comment elle a débuté, pourquoi elle a passé de Saül à David et à sa famille. C’est l’histoire d’une époque troublée de transition politique et religieuse (résumée au #Ps 78). La menace philistine qui se fait plus pressante vers 1100 fait ressentir aux Israélites le besoin d’un chef unissant les tribus contre l’ennemi, d’un centre politique et religieux Les livres de Samuel racontent comment cela s’est réalisé : Dieu leur a donné un roi (#1S 8) et un centre religieux à Sion (#2S 5:7; 6:1-17). Il est resté fidèle à ses promesses, malgré l’infidélité des chefs d’Israël. Bien que la demande d’un roi ait signifié sa mise à l’écart (#1S 8:7), il bénit leur roi et conclut avec David une alliance qui lui promet pour toujours un successeur (#2S 7:8-17). 
 
    On peut distinguer 3 sections. 
 
1. Samuel, Prophète et Juge (#1S 1:1-7:2) : sa naissance, son enfance, sa vocation au ministère prophétique (#1S 3:20) ; son autorité incontestée, après la mort d’Éli (#1S 4) ; son œuvre de réforme et le succès de son intervention spirituelle, lorsque les Philistins attaquent Israël, lui confèrent le droit d’exercer la fonction de Juge (#1S 7:1-12). Sommaire des résultats de son administration (#1S 7:13-17).
2. Règne de Saül (#1S 8:1-31:2).
 
a) Le peuple demande à Samuel, vieillard, d’établir un roi sur Israël. Le prophète y consent, bien malgré lui (#1S 9). Samuel rencontre Saül ; il lui donne, en privé, l’onction royale (#1S 9:1-10:16). Samuel convoque le peuple à Mitspa, où Saül, élu roi par le sort (#1S 10:17-26), est l’objectif du mépris de quelques mécontents (#1S 10:27). La victoire de Saül sur les Ammonites confirme sa royauté (#1S 11). Samuel adresse un discours au peuple, puis se retire de la vie publique (#1S 12).
b) Les Philistins sont repoussés, mais Saül désobéit à l’ordre de l’Éternel relativement au sacrifice (#1S 13). Jonathan attaque un poste philistin et met les ennemis en déroute (#1S 14:1-46). Sommaire des guerres de Saül (#1S 14:47,48). Sa famille (#1S 14:49-51). Récit détaillé de la guerre contre les Amalécites ; Saül désobéit pour la 2e fois aux ordres de Dieu (#1S 15).
c) Dernières années du règne de Saül ; son attitude à l’égard de David (#1S 16:1-31:2). Dieu rejette Saül et commande à Samuel d’oindre David (#1S 16:1-13). Saül, tourmenté par un mauvais esprit invite David, le joueur de harpe, à la cour (#1S 16:14-23) ; David tue Goliath et reste dès lors auprès du roi (#1S 17:1-18:5). Jalousie de Saül : il attente à la vie de David (#1S 18:6-19:17). Fuite et vie errante de David (#1S 19:18-27:12). Invasion philistine ; Saül consulte la devineresse d’Eyn-Dor (#1S 28). David, exclu du camp des Philistins, poursuit une troupe d’Amalécites pillards (#1S 29:1-30:2). Bataille de Guilboa ; mort de Saül (#1S 31).
 
3. Le roi David (#2S 1:1-24:2). David apprend le décès de Saül (#2S 1). Rivalité de David, soutenu par les hommes de Juda, et d’Ich-Bocheth, chef des autres tribus (#2S 2:1-4:2). David proclamé roi par toutes les tribus d’Israël (#2S 5:1-3). Son règne (#2S 5:4-24). Voir David.
 
    L’institution de la monarchie marque un grave point tournant dans l’histoire d’Israël. À la théocratie de Moïse et de Josué, avait succédé l’anarchie des Juges. Samuel redressa la situation, mais le peuple était las de dépendre trop directement du Dieu saint. D’autre part, son manque de foi le faisait trembler en face de ses ennemis, et il exprima le désir d’avoir un roi « comme il y en a chez toutes les nations » (#1S 8:5). Samuel en éprouva un vif déplaisir (#1S 8:6; 12:17-19), et l’Éternel fit remarquer que c’était lui-même et son règne que le peuple rejetait (#1S 8:7-9). Saül fut donc choisi, avec tous les avertissements voulus (#1S 8:10-10:27; 12:1-25) ; toutefois Dieu, dans sa condescendance, n’abandonna pas son peuple. Il soutint Saül tant que celui-ci demeura fidèle (#1S 10:24-26; 11:6-13; 12:22-23,25), mais il le rejeta à cause de ses désobéissances (#1S 13:13-14; 15:22-23). Puis David fut désigné, « l’homme selon le cœur de Dieu » (#1S 16:1-13), qui marcha vraiment dans les voies de l’Éternel (sauf dans l’affaire d’Urie, #1R 15:5). Le Seigneur lui promit qu’il deviendrait l’ancêtre du Messie (#2S 7:8-16), le Roi divin, seul capable d’accomplir le plan de Dieu et d’établir la théocratie sur des bases justes et éternelles. « Ce chevauchement des 2 desseins, l’un divin et spirituel, l’autre humain et charnel, se manifeste dans l’histoire de Saül comme dans celle de David, à travers tout le livre » (Manley, Nouveau Manuel de la Bible, page 176). 
 
      Dans la littérature mondiale, ces livres constituent un premier exemple d’historiographie objective. Ils se situent sur la même ligne que les livres bibliques qui les précèdent (Genèse à Juges) où l’on parle aussi ouvertement du péché des hommes de Dieu. Les annales des rois égyptiens et assyriens étaient des écrits de propagande exaltant les rois. Ici, comme ailleurs dans la Bible, les personnages les plus éminents sont présentés avec leurs côtés négatifs aussi bien que positifs. La véracité des récits est confirmée par les Chroniques, par #Mt 12:3-4 ; #Ac 13:20-23 ; #Hé 1:5 …  
 
      But. 
 
     Le but de ces livres est à la fois historique et religieux. Comme histoire, ils veulent répondre aux questions que tout Israélite du royaume de Juda devait se poser : Que s’est-il passé après la période des Juges ? Comment en est-on venu à avoir un roi ? Pourquoi ce changement de dynastie après le premier roi ? Quelles sont les caractéristiques d’un bon roi ? Quelle a été l’origine des prophètes ? Quel fut leur rôle dans la période transitoire entre les Juges et la royauté ? Et leur rôle auprès des premiers rois ? On s’est demandé si l’auteur était pro ou anti-monarchique. En fait, il n’est ni l’un ni l’autre. D’une part, il critique la royauté (#1S 8; 12:19), d’autre part, il en relève les aspects positifs (#1S 10:24-27; 11:14 et suivant). Après l’échec de la prêtrise (#1S 2:12 et suivant) et des juges (#1S 8:1 et suivant), c’était la seule solution qui restait. Il montre surtout que le prophétisme s’est développé parallèlement à la royauté (#1S 19:20 ; cf. #2R 2:3-5; 4:38) et que les prophètes ont joué un rôle important pour garder les rois dans la bonne voie (#1S 13:11; 15:16 ; #2S 7:4 et suivant) ou les y ramener (#2S 12). 
 
      L’auteur explique pourquoi le premier roi fut rejeté : à cause de son infidélité qui l’a mené jusqu’à rechercher ceux qui évoquent les morts (#1S 28). Ensuite, il souligne la droiture de David (« un homme au cœur droit »). Certes, David n’était pas parfait. Son péché (#2S 11) est une abomination, mais Dieu lui a pardonné car sa repentance était sincère, contrairement à celle de Saül. Les deux livres constituent une apologie de la promesse divine faite à David (#2S 7) toujours, un de ses successeurs régnera sur Israël. 
 
      En même temps, ces livres contiennent de nombreux leçons spirituelles : Dieu dirige l’histoire d’Israël et toutes ses péripéties. Il juge prêtres et rois et remplace ceux qui sont infidèles (Éli, Saül) par des plus fidèles (Samuel, David). Il n’utilise pas les mêmes critères que l’homme (#1S 16:7). Ce qu’il demande avant tout, c’est l’obéissance, qui vaut mieux que les sacrifices (#1S 15:22). 
 
      Le croyant de la nouvelle alliance peut trouver dans ces livres bien des préfigurations de Christ : Samuel, le serviteur de Dieu fidèle qui fut à la fois prêtre, prophète et gouvernant du peuple ; Jonathan, l’ami fidèle, intermédiaire entre son père et David ; David, le roi-berger né à Bethléhem qui, après son onction royale, fut méprisé par la majorité du peuple …  
 
      Plan. 
 
  Les livres se subdivisent naturellement d’après l’histoire des personnages qu’ils présentent : 
 
1. Les derniers juges (#1S 1:1-12:2)
 
a) Transition : d’Éli à Samuel (chapitres 1-3)
b) Samuel, juge d’Israël (chapitres 4-7).
 
2. Saül : premier roi d’Israël (chapitres 8-31)
 
a) Transition : Samuel-Saül (chapitres 8-12)
b) Echec du règne de Saül (chapitres 13-15.9)
c) Transition Saül-David (15.10-31).
 
3. David roi (#2S 1:1-24:2)
 
a) Son triomphe (1-10) :
 
-politique (chapitres 1-5),
-spirituel (chapitres 6-7),
-militaire (chapitres 8-10).
 
b) Son péché (chapitre 11) :
 
-adultère (11.1-5),
 
-meurtre (11.6-27)
 
c) Difficultés (chapitres 12-24)
 
-dans sa famille (12.1-13.36)
-dans son royaume (13.37-24.25).
 
 
 
Fragment de parchemin de #1S 23:9-16 découvert à Qumrân et remontant au 3e siècle avant Jésus-Christ. 
 
Copyright Editions Emmaüs 

 

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