Sermon sur la montagne.

11/06/2015 08:16
Sermon sur la montagne. C’est le titre donné par saint Augustin (354-430) au sermon de Jésus, rapporté dans #Mt 5:1-7:2, sur lequel il a écrit un commentaire De Sermone domini in monte. Ce docteur de l’Église y présente le modèle parfait de la vie chrétien, une loi nouvelle pour une vie nouvelle. Ce titre est resté jusqu’à nos jours, malgré les parallèles dans #Lu 6:20-49 qui situent le discours sur un plateau (#Lu 6:17). Les deux localisations ne se contredisent pas nécessairement si elles sont envisagées à partir d’un lieu géographique différent. 
 
1. Ressemblances et divergences. En chaque évangile, le sermon commence par les Béatitudes. Dans Matthieu, la formulation est générale, s’adressant à tous les disciples ; chez Luc, elle semble concerner plus directement ceux qui sont autour du Seigneur. Dans ce même évangile, Jésus fait suivre celles-ci des « Malheur à vous » (#Lu 6:24-26) qui pourraient bien s’adresser à des auditeurs étrangers venus se joindre au groupe et à qui Jésus donne un sérieux avertissement. Car s’il a commencé son discours, entouré de ses disciples, il l’a terminé au milieu d’une foule (#Mt 7:28), du peuple (#Lu 7:1). Dans les deux évangiles, le sermon se termine par la parabole des deux maisons, construites sur le roc ou le sable, pour faire comprendre à tous que l’écoute de la Parole de Dieu doit être suivie d’une mise en pratique. Le texte de Luc est nettement plus court. Il met l’accent sur l’amour des ennemis (#Lu 6:27-36) et le danger de l’esprit de jugement (#Lu 6:37-45). Le reste des textes qui font partie du discours rapporté par Matthieu sont éparpillés chez Luc en de nombreux endroits. Une synopse renseignera ceux qui voudraient en faire la liste. Une telle différence entre Matthieu et Luc pourrait faire croire à deux discours différents. Le contexte assez semblable dans Matthieu comme dans Luc, ne permet pas facilement cette conclusion. Il est vrai que, dans Matthieu, le Seigneur appelle ses premiers disciples (#Mt 4:18-22), alors que dans Luc, il choisit et consacre déjà les douze apôtres (#Lu 6:12-16). Mais, après le sermon, dans les deux évangiles la guérison du serviteur du centenier à Capernaüm, suit immédiatement (#Mt 8:5 ; #Lu 7:1). Pourquoi une ressemblance aussi évidente, avec autant de différences ?
 
2. Une compilation thématique. L’évangile de Matthieu, tout en respectant la trame historique générale, présente et ordonne les textes, principalement les grands discours de Jésus, selon un schéma précis. Écrivant d’abord pour les Juifs, Matthieu veut convaincre ses lecteurs de la messianité de Jésus. Il jalonne d’ailleurs son évangile de 5 grands discours. Ce chiffre évoque les 5 livres du Pentateuque (F. F. Bruce le suggère dans Les documents du Nouveau Testament. Peut-on s’y fier ? édition 1977, page 48). Après le Sermon sur la montagne, les 4 autres discours sont : apostolique, #Mt 10 ; des paraboles, #Mt 13 ; pastoral, #Mt 18 ; eschatologique, #Mt 24:1-25:2. Cette construction littéraire n’est pas arbitraire, car des jalons la font reconnaître par une même formule qui revient à la fin de chaque discours : Quand Jésus eut achevé …  #Mt 7:28; 11:1; 13:53; 19:1; 26:1, cette dernière mention liant manifestement la gerbe de toutes les autres. Matthieu présente aussi Jésus sur la montagne, comme Moïse qui fut pareillement sur une montagne pour apporter la révélation divine au peuple de Dieu. Les lecteurs juifs auront fait le rapprochement.
Le Sermon sur la montagne, comme premier de la série, établit les règles de vie des citoyens du royaume. C’est une carte d’identité de ce que doivent être les disciples de Jésus. Ce discours, prononcé dans la première année du ministère de Jésus, en Galilée (#Lu 7:1), alors que les disciples ne sont qu’au début de leur formation à l’école du Maître, contient trop d’éléments pour avoir été dit tel quel, d’une seule traite. Il n’y a pas seulement l’abondance de la matière, mais aussi le côté abrupt avec lequel certains Thèmes  —  comme celui de la prière  —  sont introduits. Ce qui fait supposer que Matthieu a probablement pris un sermon historique, dont le texte se recouperait avec celui de Luc, noyau autour duquel Matthieu aurait ajouté des éléments pour le but qu’il se propose.
 
3. Le but proposé par Matthieu. Il est double. Comme nous l’avons déjà dit, le texte est une instruction à l’intention des disciples sur ce qu’ils doivent être et faire. Mais il est aussi, par l’autorité de celui qui parle (#Mt 7:29), une attestation de sa royauté divine, messianique. Ainsi, dans la première grande section (#Mt 5:17-48), Jésus déclare être celui qui accomplit la Loi et les prophètes (#Mt 5:17), juge et déclasse les scribes et les pharisiens (#Mt 5:20). Puis, dans une formule six fois répétée : Vous avez entendu qu’il a été dit …  mais moi je vous dis …  (#Mt 5:21-22,27-28,31-32,33-34,38-39,43-44), il ose parler au même niveau que le Dieu du Sinaï. En réalité, il est ce Dieu-là. Les textes qui suivent le chapitre 5 sont marqués de la même autorité, en sorte que le succès de toute la vie, en tous ses aspects (#Ps 1:3) dépend de l’écoute et de la mise en pratique de ses paroles (#Mt 7:24-27). Des signes prophétiques ou miraculeux ne compensent pas l’exigence suprême de la soumission à sa parole (#Mt 7:21-23). Tel est ce Roi qui parle ! Et, s’adressant à ses disciples, il commente la Loi en l’interprétant selon un principe qu’il applique à chaque exemple : passer du geste et de l’action à l’intention secrète du cœur, aller ainsi à l’esprit de la Loi, utiliser le 10e commandement comme clé d’interprétation. Le germe du meurtre, de l’adultère et de tous les autres péchés est déjà dans la pensée, dans l’émotion naissante que Dieu seul voit. En procédant ainsi, Jésus nous fait comprendre pourquoi la justice des scribes et des pharisiens est déclassée (#Mt 5:20). Ils sont les hypocrites dénoncés plus loin (#Mt 6:2,5,16). Jésus nous fait perdre, ici, nos illusions de ne jamais pouvoir observer la Loi par nos propres forces. Ainsi Kittel y a perçu une telle exigence que, pour lui, le discours conduit l’homme désespéré à se repentir devant Dieu et à mettre sa foi en Jésus-Christ (#Ac 20:21).
 
4. Diverses interprétations. Il n’est pas possible d’énumérer ici toutes les solutions qui ont été proposées. En voici quelques-unes. Au début de l’article, nous avons mentionné saint Augustin qui y voyait l’idéal de la vie chrétien. Plus tard, à l’heure où fleurit la vie monastique, ce sermon se résume, pour une élite, à un ensemble de conseils de perfection. Les Réformateurs y perçoivent l’expression parfaite de la justice divine. Tolstoï, romancier russe et réformateur social croit y discerner les lois principales pour préparer un monde où le mal n’existerait plus : une solution utopique. Albert Schweizer juge le sermon trop radical et totalement irréalisable, l’attribuant à une éthique interne, pour les fidèles de la première heure attendant une parousie imminente. L’interprétation dispensationaliste y a vu, parfois, un ensemble de règles pour le peuple juif participant au royaume terrestre du Millénium. Plus simplement, beaucoup y ont vu l’exposé d’une pensée élevée, exprimant ce que l’homme devrait être et faire.
 
     En conclusion, nous dirons que ce sermon exprime la volonté divine qui ne saurait être atténuée en aucune manière, car Jésus nous transmet la parole éternelle de Dieu qui n’est ni dépassée, ni révisée, ni périmée. Ce message n’est pas donné comme un programme destiné à améliorer le monde, mais il s’adresse à ceux qui ont spirituellement quitté le monde, pour entrer déjà dans le royaume. Mais il est vrai que les chrétiens, en le pratiquant par la grâce de Dieu, sont sel de la terre et lumière du monde (#Mt 5:13-14). Ainsi sans le changer radicalement, ils sont déjà pour ce monde une bénédiction. Enfin, comprenons que l’enseignement du Seigneur n’est pas un idéal totalement irréalisable, mais il n’est pas non plus un programme que nous accomplissons déjà parfaitement. 
 
      De ce point de vue, le Sermon sur la montagne a aussi sa dimension eschatologique, ce que sous-entendent clairement les Béatitudes du début et la parabole des deux maisons à la fin. 
 
      Simple plan analytique 
 
      Manuel des citoyens du royaume (#Mt 5:1-7:2) 
 
1. Ils sont bénis et une bénédiction (#Mt 5:1-16)
2. Leurs rapports avec la Loi (#Mt 5:17-48)
3. Leurs pratiques religieuses (#Mt 6:1-18)
4. Leur attitude face aux richesses (#Mt 6:19-34)
5. Leurs rapports avec autrui (#Mt 7:1-12)
6. Leur salut personnel (#Mt 7:13-29)
 
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