Tradition

08/05/2014 08:48
Tradition. La tradition est la transmission de croyances et de pratiques d’une génération à l’autre, surtout par voie orale. Elle a joué aussi un rôle dans la constitution des Saintes Écritures, beaucoup de ses livres contenant des matériaux transmis d’abord par tradition orale. 
 
      Différents termes grecs sont rendus en français par le mot tradition : 
 
1. paradosis désigne l’action de transmettre ou l’objet de la transmission (#Mt 15:2,6 ; #Mr 7:3,5,8,13 ; #Ga 1:14 ; #Col 2:8 ; #2Th 3:6).
2. paradidômi (transmettre) s’applique par exemple à la transmission de la tradition des anciens (#Mr 7:13), aux coutumes transmises par Moïse (#Ac 6:14), aux décisions prises par les apôtres et transmises aux Églises (#Ac 16:4), aux instructions de Paul (#1Co 11:2).
3. paralambanô se réfère à ce qui est reçu comme tradition (par exemple des observances traditionnelles : #Mr 7:4 ; l’Évangile : #1Co 15:1, un évangile différent de celui apporté par Paul : #Ga 1:9 ; etc.).
 
 
      Les hommes qui vivent en société ne sont pas seulement concernés par leur époque ou leur environnement, ils sont porteurs d’un riche héritage du passé que l’on peut appeler tradition. Les croyances, coutumes, réflexions aussi bien que les institutions, inventions, comportements sociaux, textes, œuvres du passé …  font partie de cet héritage traditionnel. Son importance s’apprécie surtout par les contacts avec des peuples ayant une autre tradition. On distingue généralement la tradition orale de la tradition écrite, quoique cette distinction ne soit pas aussi tranchée qu’il apparaît à première vue ; en effet, chez les peuples sans tradition écrite, la tradition orale a des caractères de fixité et de fiabilité souvent très proches de ceux d’un texte écrit. 
 
1. La tradition juive. Afin de comprendre ce qu’est la tradition juive ancienne, il faut partir de l’existence de l’alliance de Dieu avec Israël. Les bénédictions et les obligations liées à cette alliance ont été transmises ensemble de père en fils aux générations suivant celle du désert. Pour hériter des promesses divines, les Israélites devaient obéir à cette Loi et en transmettre les ordonnances à leurs descendants (#Ge 18:19 ; #De 4:9; 6:6 et suivant ; #Ps 78:3-7). À cause des différentes attaques que les Juifs ont dû subir de la part des peuples païens contre leur particularisme religieux et culturel, de l’infiltration des cultures ambiantes, notamment au cours de l’époque hellénistique, des efforts faits par Antiochus Épiphane IV puis par les Romains pour helléniser leur culture, les Israélites ont toujours considéré que la protection et la défense de la tradition de leurs pères contenue dans la Torah faisait partie de leur fidélité à l’Éternel. Derrière l’autorité de la tradition ils voyaient l’autorité de Dieu. Ce zèle pour la Torah a amené certains Juifs à défendre les valeurs traditionnelles par les armes. Ce même zèle a aussi permis l’élaboration d’un savoir centré sur la Loi et la création d’un enseignement basé sur les méthodes pédagogiques de ce temps (imiter + apprendre par cœur). Ainsi au 5e siècle avant Jésus-Christ, le système éducatif juif basé sur la transmission du savoir traditionnel était l’un des plus développés du monde antique.
Mais peu à peu les rabbins ont fait une distinction entre Torah écrite et Torah orale, c’est-à-dire entre l’Ancien Testament et la tradition orale (= Talmud). Cette dernière interprétait, complétait et parfois corrigeait la loi écrite. Dans le Nouveau Testament, cette tradition orale est appelée « la tradition des anciens » (#Mt 15:2 ; #Mr 7:3,5).
2. Jésus et la tradition. Les évangiles font souvent allusion à la tradition des pharisiens et des scribes. Alors que les sadducéens estimaient que seul le texte écrit était normatif, les pharisiens avaient élaboré une tradition orale très complexe pour interpréter les passages difficiles, ambigus ou, à leur avis, fautifs de la Parole écrite. Cette tradition orale avait pour eux la même force de loi que la Torah écrite.
 
 
      Par exemple, l’interdiction de travailler et de voyager un jour de sabbat exigeait, selon eux, une définition de ce qu’est un travail et un voyage pour éviter que quelqu’un enfreigne la loi par ignorance de ses exigences. De nouvelles circonstances demandaient une adaptation des anciens commandements (par exemple : a-t-on le droit de dépasser le « chemin de sabbat », la distance normalement permise ce jour-là, pour se rendre à la synagogue ?). L’ensemble de ces commentaires et précisions ont été rassemblés et codifiés dans la Michna. Les interprétations et applications de ce texte  —  qui faisait autorité  —  ont donné les Talmuds palestiniens et babyloniens. Les découvertes de la mer Morte ont révélé que les sectaires de Qumrân avaient les mêmes préoccupations que les pharisiens relatives au respect des traditions pour maintenir la pureté d’Israël. Des incidents rapportés dans les évangiles nous montrent Jésus attaquant dans certains cas ces traditions : le lavement des mains (#Mr 7:1-5), le jeûne deux fois par semaine (#Mr 2:18), les définitions des travaux autorisés le jour du sabbat (#Mr 2:23-3:6 ; #Lu 13:10-16 ; #Jn 7:22-23), la règle du qorbân (#Mr 7:9-13). Il a montré que souvent le respect des traditions amenait à une violation de fait des intentions de la Loi (#Mt 5:21-22,27-28,38-39). 
 
      Dans la perspective de la proximité du Royaume de Dieu, l’essentiel de la Loi se résumait dans l’amour de Dieu et du prochain. Jésus ne considérait pas un tel enseignement comme une innovation, mais comme une fidélité à l’essence de la Loi de Dieu transmise. Pour lui, comme pour l’Église primitive, l’amour constituait le point focal de toute la Loi (#Mt 22:34-40 ; #Ro 13:8-10 ; #Ga 5:14). Les Saintes Écritures tenaient une place unique pour Jésus, car elles seules avaient pleine autorité, mais il les réinterprétait, c’est-à-dire en donnait le sens profond dans son enseignement et par son comportement (voir #Lu 4:16-21). Les rabbins aussi savaient que l’amour de Dieu et des autres résumait la Torah, mais ils pensaient nécessaire d’observer aussi tous les commandements de la loi écrite et orale. Jésus reconnaissait l’autorité des pharisiens et des scribes (#Mt 23:3), mais il les critiquait parce qu’ils ne mettaient pas leur enseignement en pratique et qu’ils faisaient de la Torah une lourde charge pour leurs concitoyens. Il fut amené à rejeter la tradition orale (#Mr 7:1-23), car il faisait clairement la distinction entre les commandements divins et les ordonnances humaines des « pères » qu’il appelait « la tradition des hommes » (#Mt 15:3,6,9 ; #Mr 7:6-13). 
3. La tradition dans l’Église primitive. L’attitude de Jésus envers la tradition a joué un rôle important dans la séparation subséquente de l’Église primitive d’avec le judaïsme (voir #Col 2:6-23), car pour les Juifs, la tradition des pères orientait toute leur interprétation des Écritures et leur compréhension de la foi. Les apôtres continueront à parler en termes plutôt dépréciatifs de la « vaine manière de vivre héritée de nos pères » (#1P 1:18). Paul l’appelle « la tradition de mes pères » (#Ga 1:14) ou « les coutumes de nos pères » (#Ac 28:17; 6:14; 15:1; 21:21; 26:3) ou « la loi des pères » (#Ac 22:3) et prend ses distances par rapport à elles.
4. La tradition apostolique. Pour les premiers chrétiens Jésus était le fondateur d’une nouvelle tradition. Il est cité en exemple dans les lettres de Paul (#Ro 15:1-7 ; #1Co 10:33-11:2 ; #2Co 8:9 ; #Ep 4:31-5:2,25), dans l’épître aux Hébreux (#Hé 12:2 et suivant) et dans les lettres de Pierre et de Jean (#1P 2:18-25 ; #1Jn 2:3-11; 3:16; 4:7-11). À côté de lui, se formait la tradition apostolique constituée par l’exemple de vie des apôtres (#1Co 4:16; 10:33-11:2 ; #1Th 1:6 ; #2Th 3:6-13). Cette tradition il faut la « maintenir » (#2Th 2:15), la recevoir et la transmettre (#1Co 11:2,23; 15:3 ; #Ro 6:17 ; #Ph 4:9 ; #Col 2:6 ; #1Th 2:13). Paul, par exemple, a transmis aux Églises ce qu’il a reçu du Seigneur (#1Co 11:23; 15:3). Cette expression « reçu du Seigneur » ne signifie pas qu’il l’a reçu en vision par une révélation directe, mais par une tradition qui remonte au Seigneur. : apo tou kuriou peut-être traduit : à partir du Seigneur, c’est-à-dire par une chaîne de transmission remontant au Seigneur lui-même. Cette expression n’exclut donc pas une transmission historique par l’Église primitive. La tradition apostolique comprend d’une part des règles morales (#Ro 6:17 ; #1Co 11:2 ; #Ph 4:9 ; #Col 2:6 ; #2Th 3:6), d’autre part, un résumé du message chrétien (#1Co 15:3 et suivant).
5. La tradition dans l’Église ancienne. « L’Église ancienne a distingué entre la tradition apostolique et les traditions postérieures appelées traditions ecclésiastiques. L’établissement du Canon des Écrits du Nouveau Testament par l’Église du second siècle a montré clairement que l’Église elle-même désirait se soumettre à l’autorité de la tradition apostolique fixée par écrit » (O. Cullman, La tradition, page 44) et que seul sera considéré comme norme apostolique ce qui est écrit. « En posant le principe d’un Canon, l’Église du 1er siècle a pris une décision engageant tout l’avenir de l’Église » (idem, page 45).
6. Tradition orale et évangiles. Les études récentes des savants scandinaves ont mis en valeur la fiabilité des traditions orales chez les peuples sans tradition écrite. Leurs études ont remis en honneur les théories expliquant les similitudes des évangiles synoptiques par la tradition orale (voir Évangiles).
 
 
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